Photo : © Palestine Deep Dive
Selon un nouveau rapport de l’organisation humanitaire Refugees International, Israël a créé des "conditions proches de la famine" dans la bande de Gaza "tout en entravant et en sapant la réponse humanitaire".
Les recherches menées par l’organisation en Égypte, en Jordanie et en Israël ont révélé que Tel-Aviv "entravait systématiquement et sans fondement les opérations d’aide à l’intérieur de Gaza, bloquait les opérations de secours légitimes et s’opposait à la mise en œuvre de mesures qui permettraient véritablement d’améliorer l’acheminement de l’aide humanitaire à Gaza".
Le rapport s’appuie sur des entretiens avec des dizaines de responsables gouvernementaux, de travailleurs humanitaires et d’employés d’ONG engagés dans des actions d’aide sur le terrain dans les trois pays.
"Nos recherches montrent clairement que les conditions à l’intérieur de Gaza sont apocalyptiques", indique le rapport publié jeudi.
"Après cinq mois de guerre, les Palestiniens luttent pour trouver de la nourriture, de l’eau, des abris et des médicaments de base. La famine est déjà largement répandue et s’aggrave."
Non-respect de la décision de la CIJ
Refugees International a également déclaré qu’Israël "n’a manifestement pas respecté" les mesures provisoires juridiquement contraignantes ordonnées le 26 janvier par la Cour internationale de justice (CIJ) pour faciliter l’acheminement de l’aide et atténuer les souffrances humanitaires à Gaza.
Dans sa défense devant la CIJ, Israël a fait valoir qu’il avait activement éliminé les goulets d’étranglement et amélioré l’entrée et la distribution de l’aide à Gaza.
Le rapport révèle que les autorités israéliennes ont "érigé des obstacles inutiles, des processus logistiques compliqués et un système de contrôle imprévisible, rendant le régime d’inspection excessivement lourd avec des couches de bureaucratie et d’inspection et des heures de travail limitées".
Alors qu’Israël affirme avoir augmenté la capacité de livraison de l’aide à Gaza, le nombre moyen de camions livrés en février a en fait chuté de 50 % par rapport au mois précédent, selon les données des Nations unies citées dans le rapport.
Des points de passage cruciaux comme Erez, au nord, et Al-Muntar - connu sous le nom de Karni par les Israéliens - restent fermés, ce qui entrave l’accès au nord de la bande de Gaza.
Le rapport indique qu’Israël n’a pas respecté les termes d’un mémorandum de sécurité nationale (NSM-20) publié en février par l’administration du président américain Joe Biden, qui exige que les pays recevant une assistance sécuritaire américaine facilitent activement l’acheminement de l’aide humanitaire dans la bande de Gaza.
Problèmes logistiques
Refugees International a constaté que des problèmes logistiques en Égypte et en Jordanie limitent la distribution d’une aide vitale aux habitants de Gaza.
Le point de passage de Rafah entre Gaza et l’Égypte, principalement destiné aux livraisons commerciales, n’a pas la capacité de traiter l’importante quantité d’aide dont la bande de Gaza a besoin. Les autorités égyptiennes ont également cherché à empêcher une réponse humanitaire à grande échelle dans le nord du Sinaï, une zone militaire.
Le rapport indique que l’Égypte a réagi aux pressions exercées par Israël pour ouvrir ses frontières aux réfugiés palestiniens en intensifiant sa surveillance et sa réglementation de l’accès des organismes d’aide à la zone frontalière, ainsi que son contrôle de l’entrée et de la sortie des personnes à destination et en provenance de la bande de Gaza.
Les organisations caritatives qui acheminent l’aide à Gaza depuis Amman, la capitale jordanienne, ont déclaré à Refugees International que les responsables israéliens avaient mis en place des "obstacles difficiles" qui n’existaient pas auparavant et qu’ils n’avaient pas encore fourni de procédures opérationnelles normalisées claires aux autorités jordaniennes.
De nouveaux obstacles, tels que de nouvelles exigences en matière d’inspection, bloquent également l’aide au passage du pont Allenby vers Israël et au passage frontalier de Karem Abu Salem (Kerem Shalom).
Appels au cessez-le-feu
Le rapport appelle les parties belligérantes à Gaza à "accepter immédiatement un cessez-le-feu mutuel et la libération de tous les otages" ainsi qu’à "adhérer au droit humanitaire international et à s’abstenir de toute action qui menace les droits, la sécurité et la dignité des civils palestiniens et israéliens".
Les États-Unis, le Qatar et l’Égypte ont passé des semaines à tenter de négocier un accord dans lequel le Hamas libérerait les prisonniers israéliens en échange d’un cessez-le-feu de six semaines, de la libération de certains prisonniers palestiniens et d’une augmentation de l’aide à Gaza.
Mais trois jours de négociations avec le Hamas cette semaine sur un cessez-le-feu à Gaza n’ont pas permis d’aboutir à une percée, moins d’une semaine avant le début du mois sacré musulman du Ramadan - la date limite informelle pour un accord.
Refugees International a également demandé que cessent les attaques contre les civils et les infrastructures et que les Nations unies et les agences d’aide puissent accéder aux populations dans le besoin.
Entre autres recommandations, l’organisation a déclaré qu’Israël devait s’abstenir "d’une offensive militaire à Rafah et d’autres actions susceptibles de déplacer davantage les Palestiniens ou d’aggraver de quelque manière que ce soit la crise humanitaire".
L’armée israélienne se prépare depuis longtemps à une invasion terrestre dans la ville frontalière de Rafah, au sud de Gaza, où plus de la moitié des 2,3 millions d’habitants de l’enclave ont été déplacés de force.
Depuis le 7 octobre, au moins 30 800 Palestiniens ont été tués et 72 198 blessés lors des attaques israéliennes contre Gaza. Le bilan des attaques du Hamas du 7 octobre en Israël s’élève à 1 139 morts.
Traduction : AFPS